La peau une œuvre d’art en soi(e)

2,00
0 out of 5 based on 0 customer ratings
- +
  • Description

    CR_OeuvreArtSoie_01

    La peau, une œuvre d’art en soi(e)

    Collectif (Moureaux P., Le Breton D., Colignon M., Déchelette C., Belorgey M., Michel R., Lehuédé S., Moreaux M.)

    Collectif (Moureaux P., Le Breton D., Colignon M., Déchelette C., Belorgey M., Michel R., Lehuédé S., Moureaux M.), (2020), La peau, une œuvre d’art en soi(e), préface de Charlier P., Séné : Donjon Editions, 250 p., ISBN : 979‑10‑96413‑42‑3

    Compte rendu de Stéphane Héas

    Référence électronique

    Héas S., (2021), « La peau, une œuvre d’art en soi(e) », La Peaulogie 6, mis en ligne le 18 juin 2021, [En ligne] URL : https://lapeaulogie.fr/peau-oeuvre-art-soie

    Ce livre de 250 pages est explicitement présenté comme « un essai collégial », voire une invitation à une « merveilleuse rêverie ». Il rassemble des professionnels de disciplines différentes : anthropologue, biologiste, dermatologue, sociologue, plasticienne‑psychothérapeute, dessinatrice‑graveur, musicothérapeute, photographe et ingénieure‑marketing. Ce rassemblement pluridisciplinaire n’est pas usuel, surtout avec une telle diversité. Il est déroutant lorsqu’il s’agit d’en rendre compte car si des éléments théoriques sont indiqués ça et là, la thèse centrale file la métaphore du titre, à savoir la peau comme œuvre en soi. Le jeu de mots « œuvre en soie » introduit aux expériences artistiques présentées : origamis, sculptures sur métal, travail sur les peaux des instruments de musique, etc.

    La peau comme organe le plus massif et interagissant directement dans les relations quotidiennes offre cette opportunité. Elle est le sujet surtout de nombres d’analyses, de reportages, etc. Elle est sous les feux de la rampe médiatique et scientifique depuis plusieurs années déjà. Des expositions, des conférences, des groupes de recherche, des sociétés savantes et des revues lui sont, tout ou partie, consacrés. Dans la préface écrite par Ph. Charlier les connaissances et les parallèles multiples sont rappelés avec l’architecture successivement en termes d’usures et d’expositions aux éléments naturels (Moureaux P.), de signe d’identité (Le Breton D.), de créations sensorielles (Déchelette C.), d’inspiration (Colignon M.), de marquages volontaires ou non (Belorgey M.), de beauté (Moureaux M.), de surface et d’espace sonores (Michel R.) ou bien de réalité fantasmée par la photographie (Lehuédé S.). La lectrice ou le lecteur se voit donc proposer de multiples sources de liaisons, de comparaisons, de compréhensions. Des thèses parcourent ces pages comme celle de l’adaptation au milieu, de la transformation des relations à soi et aux autres. La peau est aussi présentée comme un moyen de rassemblement, et ce livre en constitue une preuve en lui‑même. Les ancrages théoriques ne sont pas essentiels dans la plupart des contributions. La valorisation des actions individuelles affleurent par la décision propre d’agir par soi‑même, voire sur soi‑même, mais aussi d’observer et surtout d’utiliser ou modeler un matériau par exemple. Au détour des pages, apparaissent la ductilité (p. 164), la reliance (p. 99) ou bien la marchandisation du paraître (p. 37), voire un « consumérisme qui s’ignore » (p. 61).

    La liberté de ton qui agrémente ces pages pluridisciplinaires autorise l’évocation et la mobilisation de notions analytiques intéressantes concernant la peau. Ainsi, lorsque sont indiquées ses caractéristiques temporelles repérées dans les traces paléoanthropologiques par exemple avec effet palimpseste des « caresses du temps » (p. 38), sa fonction paradoxale de barrière et de rapprochement ou bien l’intrication entre regards et symboles esthétiques à même la peau lorsqu’elle se présente, lorsqu’elle est photographiée, etc.

    Le livre explore la peau comme une « mince profondeur » selon la belle expression de la plasticienne et psychothérapeute M. Colignon (p. 71). Dans son parallèle entre peau et toile (de peinture), elle précise cette/sa complexité : « la surface picturale, comme la peau, cèle plus qu’elle ne dévoile. Elle enfouit en elle ce qui a été, tout en le laissant affleurer » (p. 76). Cette formulation pourrait synthétiser ce rassemblement hétéroclite de réflexions, d’actions et d’écriture sur la peau comme œuvre à mieux saisir, à comprendre précisément dans la vie, personnelle et/ou professionnelle, de chacun·e de nous. Ce livre vient de recevoir le prix Suzanne Rafflé de Chevaniel 2020 de l’essai collégial décerné par le groupement des écrivains médecins.