Lire l’évolution de la société chinoise (1960‑2010) à travers les pratiques cosmétiques ?

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    Lei WANG

    Associate professor, Faculté des langues étrangères, Université de Shenzhen, Chine.

    Référence électronique
    Wang L., (2021), « Lire l’évolution de la société chinoise (1960‑2010) à travers les pratiques cosmétiques ? », La Peaulogie 6, mis en ligne le 18 juin 2021, [En ligne] URL : https://lapeaulogie.fr/societe-chinoise-cosmetiques

    Résumé

    Rouge à lèvre ou crème de soin semble un objet banal aujourd’hui dans la vie quotidienne en Chine, mais en fait les pratiques cosmétiques ont connu une évolution radicale depuis une cinquantaine d’années. Cette étude est basée sur les histoires de vies de 45 femmes âgées entre 20 à 50 ans de Canton, Shanghai, Hangzhou, Beijing et Harbin. Elle fait clairement apparaître que les pratiques cosmétiques suivent l’évolution et le développement de la société chinoise qui, depuis les années 2000, connaît une période florissante pour les produits cosmétiques, par comparaison avec la pénurie des années 1960 et 1970 à laquelle avait succédé le développement de l’économie et l’ouverture du pays des années 1980 et 1990. L’étude des pratiques associées aux produits cosmétiques permet de prendre la mesure des immenses bouleversements qu’à connu la société chinoise depuis une cinquantaine années. Ces pratiques sont liées à l’évolution des modes de vie, des classes sociales, de la politique ou des normes morales. Elles constituent des analyseurs significatifs de cette histoire.

    Mots-clés

    pratiques cosmétiques, histoire, ville, Chine, catégories aisées

    Abstract

    Lipstick or face cream may seem like an banal object in everyday life in China, but in fact cosmetic practices have undergone radical change in the last fifty years. This study is based on the life stories of 45 women between the age of 20 and 50 from Guangzhou, Shanghai, Hangzhou, Beijing and Harbin. It clearly shows that cosmetic practices have followed the evolution and development of Chinese society from the shortage in the 1960s and 1970s, followed by the development of the economy and the opening of the country in the 1980s and 1990s, and since the 2000s, cosmetic products have experienced a flourishing period. At the same time, the use of these modern products among the women is influenced by their Chinese body conception which is a holistic vision, so women reinterpret these products in their way. The study of practices associated with cosmetic products makes it possible to take stock of the immense upheavals that Chinese society has gone through for the past fifty years. These practices linked to changes in lifestyles, social classes, politics or moral standards. They are significant analyzers of this history.

    Keywords

    cosmetic practices, Chinese conception of the body, evolution of Chinese society

    摘要

    口红或护肤霜在中国的生活中似乎是普通日用品。但实际上,在过去的五十多年中,化妆品的使用情况发生了根本性的变化。这项研究基于来自广州,上海,杭州,北京和哈尔滨的45位20至50岁的女性的生活故事。它展现出化妆品的使用伴随了中国社会的变革和发展。人们经历了1960年代和1970年代日用品严重短缺,1980到1990年代中国社会的改革开放和迅速发展,所以自2000年代以来,中国市场上的化妆品进入到丰富繁盛时期。在出现现代产品的同时,女性对它们的使用受到中国人自身身体观的影响,这是一种整体性的身体观,女性用中国方式重新诠释了这些现代产品。对化妆品使用情况的研究使人们得以回顾过去五十年来中国社会所经历的巨大变化,这种生活实践与人们的生活方式、社会阶层、政治或道德标准的变化有关,它们是这一历史的重要分析元素。

    关键词

    美容实践,中国人的身体观,中国社会的演变

    Introduction

    Cette recherche analyse des pratiques et des soins du corps en Chine chez les femmes de milieu aisé. À l’origine de notre recherche, nous connaissions peu de choses concernant les soins du corps et les pratiques cosmétiques des femmes chinoises de la classe aisée. Ce terrain nouveau pour l’enquêtrice a permis une découverte et l’initiation d’un regard sur ces pratiques cosmétiques. « La pratique de l’enquête qualitative […] la démarche est inductive, c’est‑à‑dire qu’elle cherche à explorer le réel, dans hypothèse de départ fortes, avec seulement un thème d’enquête, mais sans présupposés sur les résultats. » (Alami, Moussaoui, Desjeux, 2009, 25). Pour explorer ce domaine, nous avons envisagé les pratiques liées aux produits cosmétiques comme un élément de la culture chinoise. En tant qu’analyseur de la société, elles ne se limitaient pas à des besoins individuels. Comme chez Bourdieu (1977), le corps est à la fois « de toutes les manifestions de la ‘personne’, celle qui laisse le moins et le moins facilement modifier, et celle qui est socialement tenue pour signifier le plus adéquatement » (p. 51). Il s’agissait de chercher à comprendre la logique sociale des pratiques cosmétiques des personnes, afin de faire ressortir les contraintes et les marges de manœuvre sous contraintes que les groupes sociaux développent.

    La culture d’un pays intègre les valeurs et les représentations que les acteurs et la société se font d’euxmêmes, mais aussi les pratiques et les jeux sociaux liés aux soins du corps ainsi que l’histoire de leur évolution. C’est pourquoi, nous sommes partis d’une vision large des pratiques cosmétiques pour les analyser comme un des éléments d’un système culturel plus large, celui des soins du corps des femmes chinoises. Dans notre enquête, il s’agit de comprendre, d’abord, quelles sont les pratiques des soins du corps en Chine aujourd’hui, puis, quels en sont les buts recherchés, et plus particulièrement ceux liés aux pratiques des produits cosmétiques, et enfin, quels enjeux représentent ces pratiques en termes de tension ou de mises en scène statutaires par rapport à l’évolution des rapports sociaux en Chine, au sein de la famille, entre amis, dans le milieu professionnel et dans la société. Ensuite, nous nous sommes demandés quels sens les Chinoises accordaient à ces pratiques et à quelle conception du corps elles renvoyaient, notamment en cherchant à vérifier l’absence ou la présence d’un lien entre l’explication traditionnelle de la santé et du bon fonctionnement du corps et les pratiques concrètes de soin du corps des Chinoises et des médecins traditionnels.

    Pour répondre à ces questions, nous avons d’abord adopté un point de vue historique afin de comprendre l’évolution de la mise en scène du corps en Chine depuis cinquante ans. Pour chaque période, nous nous sommes demandés quels étaient les déclencheurs et les contraintes qui pesaient, au quotidien, sur les pratiques des produits cosmétiques.

    Notre enquête qualitative débute dans le sud de la Chine, dans la troisième grande ville chinoise : Guangzhou (Canton) qui est la capitale de la province du Guangdong, en 2010 par une étude exploratoire à partir d’entretiens semidirectifs auprès de dix femmes de milieu aisé âgées de vingtcinq à cinquante ans. L’enquête s’était déroulée chez elle pour observer sur place les produits qu’elles utilisaient, les endroits où elles rangeaient leurs produits et faisaient leurs soins du corps. Des photographies ont été prises pour illustrer leurs discours. Si elles le permettaient, nous filmions leurs soins du visage et le maquillage en posant des questions sur les pratiques. Notre objectif était d’identifier la diversité des pratiques de soin du corps et des produits cosmétiques. Cette enquête permettait, tout d’abord, de constater que les femmes interviewées possédaient de très nombreux produits pour les soins du corps. Cette abondance de produits est certes due au niveau élevé de leurs revenus, mais aussi et surtout à l’importance que ces femmes accordent aux soins du corps et au maquillage.

    Nos entretiens montrent ensuite qu’une partie des jeunes femmes se maquillent dès l’adolescence. C’est plus précocement que ce que nous prévoyions, ce qui en fait un résultat assez inattendu, si on le compare d’une part aux pratiques des jeunes femmes dans les années 2000, et si d’autre part on tient compte des règles encore en vigueur aujourd’hui en Chine qui interdisent le maquillage au lycée[1], jusqu’à donc approximativement l’âge de dixhuit ans. Les jeunes filles adolescentes ont envie de s’embellir, elles sont curieuses des produits cosmétiques disponibles sur le marché. Surtout dans les années 2000, les produits sont diversifiés sur le marché et les jeunes filles ont de l’argent de poche pour les acquérir. Si l’école interdit le maquillage, elles se maquillent hors de l’école en cachette à la sortie avec des copines. Certaines ont la permission de leur famille, ces mères semblent tolérantes sur le maquillage de leur fille pendant les vacances ou lors de voyages. C’est pourquoi, pour notre deuxième terrain, en 2011, nous avons choisi d’interviewer des femmes plus jeunes ayant autour de vingt ans à Shanghai et Hangzhou. Enfin, le troisième terrain a eu lieu en juillet 2012 à Beijing et Harbin.

    Les femmes interviewées ont entre 22 et 50 ans au moment de notre étude. Elles ont donc vécu entre 1960 et aujourd’hui. C’est une périodisation qui renvoie à des bouleversements dans l’histoire politique et économique de la Chine. L’histoire de la Chine explique l’évolution des modes de vie des Chinois depuis cinquante ans. Il y a comme une chaîne de causalités qui suit pour une part l’évolution historique de la Chine. L’évolution historique et économique organise les modes de vie des Chinois, notamment à travers l’évolution d’une offre de plus en plus importante de produits cosmétiques et d’un pouvoir d’achat de plus en plus élevé. Nous décrirons ici les grandes lignes de l’évolution des pratiques, des valeurs ou des représentations des femmes chinoises.

    En se basant sur ce que disent les interviewées de l’évolution de la société chinoise, et plus particulièrement des pratiques cosmétiques, nous avons divisé cette cinquantaine d’années en quatre périodes. La première va des années 1960 à la fin des années 1970 : matériellement, c’est la période de pénurie dans la vie quotidienne, politiquement, c’est la période de la Révolution Culturelle. La deuxième va du début jusqu’à la fin des années 1980 : l’économie commence à décoller et des interdictions sociales sur l’apparence abolies. La troisième période concerne les années 1990 : l’économie et l’offre matérielle progressent davantage. La quatrième et dernière période est celle qui va des années 2000 à nos jours : c’est une période prospère. Lors de ces différentes périodes, l’offre des produits cosmétiques évolue avec le développement de l’industrie locale, l’ouverture du marché chinois à l’étranger et le changement des moyens de distribution. Les normes sur l’apparence et les pratiques des soins du corps évoluent également avec le temps.

    À travers cette périodisation de 50 ans, nous allons voir que les pratiques du cosmétique des femmes chinoises sont influencées par trois conditions :

    Les conditions matérielles

    Le système de distribution évolue avec le développement des grands magasins, le développement de l’industrie cosmétique et l’augmentation du niveau de vie. Il y a un choix plus varié de produits cosmétiques pour les femmes.

    Les conditions sociales

    Il s’agit des normes à l’école, à l’université, dans les différents métiers.

    Les acteurs comme l’enfant, le mari, les amis, les collègues jouent chacun un rôle différent sur les pratiques cosmétiques des femmes.

    Les conditions symboliques. Les représentations des produits cosmétiques, les pratiques des soins du corps changent selon l’époque. Les publicités ou les informations diffusées dans ce domaine influencent de plus en plus les femmes avec le développement des magazines, d’internet et de la télévision.

    1960-1980 Période de pénurie et « femmes d'acier »

    C’est une période de pénurie avec la grande famine et la Révolution Culturelle. Loin d’être bien nourris, beaucoup de Chinois n’arrivent pas à manger à leur faim et s’occupent d’autant moins de soins du corps. Quand je posais une question portant sur les pratiques des soins du corps à cette époque, les interviewées répondaient immédiatement : « À l’époque, on pouvait avoir quels soins du corps ?! » Le sousentendu était que ce n’était pas possible et que c’était naïf de ma part de poser cette question. Seuls les jeunes comme moi n’ayant pas connu cette période peuvent poser ce genre de questions, car, pour les enquêtées, la réponse est évidente. « C’était déjà pas mal si on avait de quoi se nourrir ! » ; « Même ma mère n’utilisait pas de produits. Personne n’y faisait attention ». La pénurie matérielle a laissé une profonde empreinte sur cette époque. Elle était omniprésente dans la vie quotidienne de cette époque. Le gouvernement contrôlait la consommation avec des tickets de rationnement pour presque tous les articles concernant l’alimentation, les vêtements et les objets d’usage quotidien. Pour acheter un article, il fallait disposer d’un ticket correspondant et payer le produit. Touchant un salaire très bas, avec généralement une famille nombreuse[2], les Chinois se contentaient de nourrir d’abord toute la famille en se limitant aux produits de première nécessité.

    Pour la peau, il existait bel et bien des produits, mais en nombre restreint et des pratiques basiques. Beaucoup de familles partagent une seule et même crème que ce soit pour la période froide ou pour la période sèche[3]. La crème sert plus à soigner le visage que d’autres parties du corps. Pendant cette période difficile, le visage est la seule partie du corps à laquelle la plupart des Chinois prête attention. Les produits de l’époque cités par les interviewées sont toujours les mêmes : la crème de neige, une crème blanche dans un pot ; gras parfumé, sous forme d’un gras solide avec du parfum mis dans une boîte plate et ronde comme celle de la marque Baiqueling ; gras solide mis dans un coquillage, sans parfum. Il n’existe pas de types de produits selon l’âge, le type de peau, la texture ou l’efficacité.

    Outre les conditions financières difficiles, la période de la Révolution Culturelle, de 1966 à 1976, est une période différente quant aux normes de l’apparence. Le maquillage, la coiffure et les vêtements sont particuliers : il n’y a pas de maquillage, les coiffures sont simples, les tenues sont des uniformes aux couleurs sobres comme bleu, gris ou noir. La tenue militaire est une mode et il est difficile de s’en procurer un, c’est le luxe de l’époque. Tout le monde doit strictement respecter des normes imposées par une situation tendue et extrême. « Entre les années 1950 et les années 1980, le contexte social est très politique… C’est une époque où on fait grand cas de la non‑différence sexuelle et plus particulièrement pendant la Révolution Culturelle où tout ce qui montre la féminité est à combattre. Beaucoup de femmes changent leurs prénoms pour un prénom masculin, portent des vêtements d’hommes, se coiffent comme les hommes. Dans ce contexte politique extrême, toute marque de féminité est proscrite et dissimulée » (Jiang, 2008, 156). D’après les interviewées, même si la société ne valorise pas la féminité, cela n’efface pas l’aspiration à la beauté des jeunes filles. Avec la pénurie des matériaux et les normes strictes sur l’apparence, les filles cherchent quand même à se différencier par des détails comme les tresses.

    Pendant la Révolution Culturelle (19661976), il est interdit de se maquiller sauf à l’occasion des spectacles. À l’époque, des troupes de spectacle diffusent les messages de la Révolution. Mme Xu (49 ans, employée, HZ[4]) est choisie comme membre de cette troupe. Toutes les semaines, il y a un spectacle à jouer. Elle se maquille souvent. Il n’existe pas de produits démaquillant sauf un savon inefficace. Selon elle, ses taches de rousseur d’aujourd’hui sont dues au maquillage de son enfance. À ses yeux, ces tâches sont le signe des toxiques des mauvais produits de maquillage utilisés à l’époque. Et aujourd’hui, elle ne se maquille plus du tout. Malgré la plus grande disponibilité des produits de maquillage aujourd’hui, on remarque qu’un mauvais souvenir d’une expérience passée de maquillage crée chez ces femmes une résistance et empêche leurs recours pratiques. Il semble que cette empreinte forte pour cette génération des plus de 40 ans, explique en partie le fait que toutes les femmes ne se maquillent pas, même si elles n’ont pas de contraintes financières et que les produits sur le marché sont beaucoup plus développés aujourd’hui.

    D’après les femmes, pour se laver, il n’y a à l’époque qu’un seul type de savon. Même dans les familles aisées, il n’y a qu’un savon parfumé, et c’est déjà du luxe. À l’époque, les pratiques collectives de soins du corps sont fréquentes. En hiver, les gens vont aux bains publics car il n’y a, chez eux, ni douche ni bain.

    En été, beaucoup de familles urbaines utilisent La rosée des fleurs (花露水) pour chasser les moustiques et soigner les boutons de chaleur. C’est l’un des rares produits sur le marché de l’époque. On en asperge les vêtements pour chasser les moustiques et on en verse dans l’eau du bain pour prévenir et soigner les boutons de chaleur. Le talc est également présent. Ces deux produits sont utilisés quand il fait chaud. À l’époque, il n’y a pas de climatisation. Audelà de 30°C, il est fréquent, surtout chez les enfants, d’avoir des boutons de chaleur dans le cou, dans le dos et sur d’autres parties du corps. Aujourd’hui, la rosée des fleurs existe toujours, mais sur le marché pour chasser les moustiques et calmer les boutons de chaleurs, beaucoup plus de produits spécifiques et étrangers sont désormais à disposition.

    Avant 1980, la pénurie de produits sur le marché empêche les pratiques de soin du corps, quels que soient le cycle de vie et le genre. Les soins se limitent à des produits basiques comme un savon et une crème. Ces produits sont fabriqués par des usines d’État, l’économie de l’époque est cent pour cent publique. Les choix de produits sont limités.

    « Le mouvement du Grand Bond en avant (19581961) a marqué une période cruciale dans l’histoire de la République populaire de Chine, mais aussi dans l’histoire des femmes chinoises … Elles ont ainsi été mobilisées pour participer au travail salarié. … En Juin 1958, Le Quotidien du peuple publie le discours de la secrétaire générale de la Fédération des femmes chinoises : « Faire un pas en avant dans la libération de la maind’œuvre féminine pour servir la construction du socialisme d’une manière rapide et économique » (Tang, 2010). Les femmes de l’époque sont ainsi censées participer à la construction du socialisme, une « bonne » femme est une femme de fer, c’estàdire qui travaille comme un homme. « À l’occasion des grands mouvements de masse – comme le Grand Bond en avant (19591961) et la Révolution culturelle (19651968) – la propagande d’État relance l’idée d’une égalité entre les sexes, notamment dans des discours officiels relayés par le Quotidien du Peuple. Les slogans et images véhiculées par les médias, l’art et la littérature montrent des « femmes d’acier » ou des femmes aux vêtements unisexes, fortes à l’égal des hommes, durant la révolution et l’édification socialistes. » (Angeloff, 2012) Ainsi, la féminité est dévalorisée, des pratiques liées à la féminité comme le maquillage sont proscrites dans la vie quotidienne.

    S’il y a eu une rupture dans la transmission mèrefille quant à la connaissance des produits cosmétiques du fait de la Révolution Culturelle. Cela ne veut pas dire qu’aucune connaissance des soins du corps n’est transmise. Il nous semble en effet que ce qui persiste à être transmis, est la conception traditionnelle du corps qui l’envisage comme un système. Les mères apprennent à leurs filles à prendre soin de leurs corps par l’alimentation, comme les soupes cantonaises ou par les soins traditionnels.

    « Ma mère avait toujours le magazine ‘Médecin de la famille’, elle nous disait souvent que si on avait mal à un endroit, il nous fallait appuyer sur les points d’acupuncture de tels ou tels endroits. » (Mme Wang, Free lance, 40 ans, HZ)

    1980-1990 Période de reprise

    La Révolution Culturelle se termine en 1976 et la politique de la Réforme et de l’Ouverture s’applique à partir de 1979. Dès lors, le développement économique est en marche, l’industrie se développe et les produits sur le marché, y compris les produits cosmétiques, sont plus variés. Pour faire connaître de nouveaux produits, il faut des supports de diffusion. Pendant les années 1980, la télévision apparaît dans des familles urbaines aisées, avec quelques chaînes d’État et des chaînes régionales, mais le nombre de chaîne reste très limité. La télé câblée s’est développée dans les années 1990. Cependant, ces quelques chaînes permettent aux jeunes filles interviewées de connaître des produits ou de nouvelles marques à travers les publicités. À la fin des années 1980, avec le développement de l’industrie, l’emballage des produits cosmétiques est plus attirant qu’auparavant. D’après les entretiens des femmes choisissent en fonction de l’emballage qui joue donc un rôle déclencheur dans le choix d’un produit. De plus, la distribution des produits liés aux soins du corps a changé. À la fin des années 1980, les supermarchés font leur apparition. Les Chinois ont, désormais, plus d’occasions de découvrir de nouveaux produits en faisant leurs courses, en déambulant dans les rayons.

    Située dans le sud côtier, depuis l’antiquité la région cantonaise est connue pour les commerces maritimes et les locaux sont les premiers à descendre dans l’Asie du sud (下南洋). Elle est donc connue par et pour ses expatriés, les femmes cantonaises interviewées ont souvent des membres de leur famille à l’étranger ou à Hongkong, ce qui leur permet d’avoir des produits cosmétiques « branchés » à l’époque et ainsi être initiées à de nouvelles pratiques par les cadeaux reçus. Avec l’ouverture de la Chine à la fin des années 1970, des personnes d’origine chinoise mais de nationalité étrangère (华侨Huáqiáo) reprennent contacts avec leur famille résidant en Chine et reviennent les visiter. Des grands magasins sont ouverts pour eux, comme le magasin友谊(Yǒuyi) à Guangzhou. À ces endroits, les achats ne sont pas réglés en monnaie chinoise mais avec des bons d’achats spéciaux (外汇券Wàihuì quàn), spécifiquement distribués à cette clientèle étrangère. Les femmes ayant des relations avec des étrangers parviennent à recevoir des cadeaux de produits cosmétiques comme des crèmes de marques introuvables en Chine, ou se procurer auprès d’eux des bons d’achats et peuvent ainsi accéder à des produits importés et rares de l’époque tels que les parfums.

    Les femmes interviewées racontent, qu’à partir de 1985, les produits ne se limitent plus à la seule crème de neige. Il y a davantage de choix dans les produits locaux. Des marques étrangères commencent à s’installer et à fabriquer en Chine telles que Olay (P&G, américain) et Hazeline (Unilever, hollandais et britannique). Les nettoyants pour le visage font partie des nouveaux produits disponibles sur le marché. En 1987, une nouvelle crème beauté éternelle (永芳Yǒngfāng ) apparaît. C’est une crème qui a un effet blanc, un produit de soin qui ressemble à un fond de teint d’aujourd’hui. Plusieurs femmes parlent de ce produit icône. Elles racontent que c’était la mode d’avoir cette crème pour avoir une peau blanche à une époque où le maquillage était permis mais peu répandu.

    « Ma mère se déplaçait beaucoup à l’époque, elle a ramené cette crème de Guangzhou, moi et mes sœurs nous étions trop contentes. Après l’application, la peau était blanche. Mais c’était assez cher, je me souviens que le pot était tout petit qui coûtait 10 yuans (un salaire moyen de l’époque est autour de 50 yuans) » (Mme Shen, 33 ans, femme au foyer, SH)

    Il est toujours interdit de se maquiller à l’école primaire et secondaire. Et le maquillage n’est pas répandu dans la société. Des femmes gardent donc cette habitude et ne se maquillent pas du tout après l’école secondaire. D’autres commencent à se maquiller à l’université. Les étudiants à l’époque sont des élites, en tant que les premières à recevoir de hautes études, les jeunes filles acceptent plus facilement les nouveautés, les nouvelles pratiques et les nouveaux styles de vies.

    « En weekend, il y avait souvent le bal à l’université, les filles du dortoir y allaient ensemble. On ne savait pas se maquiller, on se maquillait l’une à l’autre. » (Mme Shi, 40 ans, fonctionnaire, GZ)

    Le style de vie comme le bal à l’université constitue un déclencheur de cette pratique de maquillage. Certaines se maquillent au travail, parce qu’elles exercent des métiers dans l’hôtellerie. Le maquillage de l’époque devient également très coloré, très prononcé, voyant, avec des sourcils noirs, des ombres à paupières de couleur vive et des rouges à lèvres très rouges. C’est une pratique en rupture avec l’époque précédente. De fait, leurs mères ne leur transmettent pas de pratiques. Sans magazines de mode, ni internet, ni émissions de mode, c’est par la pratique qu’elles apprennent à se maquiller. Aujourd’hui qu’elles sont plus expertes en soins du corps, leurs pratiques de l’époque apparaîtraient comme des pratiques amatrices, débutantes, pleines d’erreurs. Avec l’arrivée du gel douche sur le marché à la fin des années 1980, des interviewées de grandes villes comme Guangzhou et Shanghai déclarent l’utiliser pour se laver le corps. Sinon par rapport au visage plus exposé aux intempéries et il est possible d’avoir des gerçures et problèmes de peau par temps froid et sec si l’on ne le soigne pas ; le corps caché sous le vêtement reste négligé dans le sens où il n’y a pas de produits qui lui sont spécifiques.

    En un mot, la mode de cette époque valorise l’artificiel et le coloré par rupture avec l’époque précédente. C’est une époque de transition, de reprise et d’apprentissage des pratiques de soins du corps. C’est le début de la fin d’une époque où la Révolution Culturelle a quasiment supprimé toutes les traditions des soins du corps et du maquillage en Chine, également le début de l’abondance des produits industriels. Une partie des jeunes filles branchées et urbaines commencent à se maquiller. C’est lors de l’époque suivante, celle où commence la grande consommation, que la nouvelle génération va tout réapprendre. En 1982, lors du 12e Congrès national du parti communiste chinois, a été lancé le projet de développer l’économie planifiée avec la régulation de l’économie du marché. Au bout de 10 ans, l’économie du marché a lancé ses premiers pas. La consommation est devenue petit à petit le moteur de l’économie chinoise (Tang, 2020, 9).

    1990-2000 Période de progression

    Avant la politique de la Réforme et l’Ouverture, toute l’économie est publique. Il est interdit de faire du commerce en son nom propre. C’est à la fin des années 1980, et surtout après le discours de DENG Xiaoping au sud de la Chine en 1992, que l’État lève beaucoup de restrictions commerciales. Des individus créent leurs propres entreprises pour faire du commerce. Ce sont les premiers à constituer le milieu aisé. Les Chinois ont davantage de moyens disponibles. C’est par référence aux mutations rapides et profondes de l’économie française au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale que MarieClaire Bergère (2000) qualifie les années 1990 en Chine de « décennie glorieuse », l’expression se justifie sur le plan économique (p. 69). Elle évoque, à propos de cette décennie, le « retour du social », désignant parlà l’implantation active de la société dans le processus de développement économique et de décentralisation. Le développement économique s’accompagne d’une augmentation de consommation, commencée d’abord dans la sphère urbaine. « Poussée par un besoin de consommation trop longtemps réprimé dans la Chine maoïste, la société chinoise a d’autant mieux adhéré aux nouvelles normes économiques qu’elle était sensible à l’augmentation du niveau de vie autorisée par les réformes, surtout en milieu urbain » (Angeloff, 2010, 71). Parallèlement, la grande distribution et les grands magasins développent une offre plus variée et plus abondante, y compris en produits cosmétiques. C’est également le début des produits importés, nous avons des choix de produits cosmétiques étrangers de luxe dans les grands magasins. À partir des histoires de vie des interviewées, on peut dire que c’est à partir de 1995 que la consommation des cosmétiques croît fortement en Chine. Des produits cosmétiques et des nouvelles pratiques du corps se développent.

    Apparition des produits diversifies selon les fonctions, les parties du corps et les cycles de vie

    Les produits commencent à être différenciés selon les cycles de vie. Il existe tout d’abord une crème pour le visage de l’enfant : « face de l’enfant » (孩儿面 Hái’ér miàn). Cette marque locale dont le flacon est en forme de champignon a laissé un souvenir profond chez certaines jeunes interviewées. Il est beaucoup moins fréquent qu’elles aient partagé une crème avec leurs mères. Des femmes interviewées se souviennent, qu’après 1995, elles achetaient des produits de la marque américaine Johnson pour leurs enfants : des crèmes mais aussi des produits d’hygiène comme du gel douche ou du shampoing.

    L’offre de produits est plus variée par rapport aux années précédentes. Les produits utilisés par les femmes ne se limitent plus à un seul type de crème hydratante pour le visage, mais à divers types de crèmes et produits pour différentes parties du corps. Les femmes interviewées citent les nettoyants visages, les lotions, les émulsions, les crèmes hydratantes, les crèmes solaires, les masques, les masques pour les yeux, les sérums, les shampoings, les gels douche, les laits corporels et des gammes de produits pour les mains : gommage et crème. Les marques citées par les interviewées ne sont plus les mêmes que pour les années précédentes, et, tout comme les produits, elles sont aussi plus diversifiées. Ici on voit que les produits de soins sur le marché depuis 1990 ont plus de catégories, les femmes du milieu aisé ne se contentent plus d’hydrater la peau dans l’ensemble, mais distinguent les différentes parties du visage et du corps, les efficacités, les textures et les moments d’utilisation des produits. D’un côté l’offre du marché est plus importante, d’un autre côté, cela montre les attentions que les femmes apportent à la peau et au corps.

    Les produits de luxe commencent à devenir partie prenante des pratiques des femmes de milieu aisé. C’est le début des produits de luxe étrangers en Chine. Certaines femmes précisent que les produits utilisés à l’époque sont souvent de petites marques ou sans marque. Elles ont la curiosité d’essayer de nouveaux produits mais ne font pas trop attention aux marques. Certaines commencent à utiliser des produits de luxe importés de l’étranger comme Clinique ou SKII, alors qu’elles n’ont pas une vie aussi aisée qu’aujourd’hui. Elles constituent les premières classes moyennes jeunes et urbaines qui ressentent le besoin de prendre soin d’elles et sont attirées par les produits étrangers.

    Du fait de cette offre abondante sur le marché, les classes moyennes supérieures urbaines commencent à essayer ces nouveaux produits. C’est à l’usage qu’elles forment leur expertise sur la qualité et l’efficacité des produits, et sur les techniques de soin et de maquillage.

    Émergence des nouvelles pratiques

    L'émergence du maquillage permanent et semi permanent

    Dans les années 1990, des femmes se font des maquillages permanents ou semipermanents chez l’esthéticienne, comme le tatouage des sourcils, le tatouage de l’eyeliner ou la semipermanente des cils (se faire recourber les cils de sorte que cela tienne un certain temps). À l’époque ce sont des pratiques à la mode mais dont la technique n’est pas très au point. Sur le terrain, nous avons rencontré plusieurs femmes qui ont suivi la mode dans les années 1990 et qui se sont faites faire un maquillage permanent comme le tatouage des sourcils, le tatouage de l’eyeliner et la semipermanente des cils recourbés dont l’effet ne dure pas comme elles l’espéraient. Avec le temps, la couleur du tatouage se dégrade et elles sont obligées de se maquiller les sourcils ou le contour des yeux avec un produit cosmétique pour que la couleur apparaisse plus naturelle. La semipermanente des cils abîme et fait tomber les cils. Des femmes se sentent obligées d’utiliser un mascara pour compenser les cils tombés. Les femmes ayant envie de s’embellir ont essayé de nouvelles pratiques et techniques chez les professionnels, mais les effets ne sont pas toujours ceux espérés. Cela complexifie leur pratique du maquillage d’aujourd’hui pour restaurer les mauvais effets. Elles prennent conscience que les pratiques permanentes comportent des risques.

    L'émergence des soins chez les professionnels en institut de beauté

    Dans le même temps, les instituts de beauté commencent à émerger sur le marché. Dans les années 1990, leur nombre est encore limité et leurs offres de soins se cantonnent aux soins du visage. Aller faire des soins en institut de beauté est une pratique qui n’est pas encore répandue. C’est un luxe à l’époque. Par rapport aux soins à la maison par ellesmêmes, certaines interviewées ont commencé à faire des soins en institut de beauté dès cette époque. Parce qu’elles se sentent davantage le besoin de soigner leur peau. Un effet d’entrainement existe puisque leurs copines et d’autres personnes de leur entourage y vont aussi. En outre, les dépenses sont également à leur portée. Ces trois éléments constituent les déclencheurs pour les demandes de soins en institut de beauté.

    D’une pénurie à une reprise de l’habitude des soins et du maquillage, les produits, lors de cette période de croissance entre 1990 et 2000, commencent à se diversifier sur le marché. C’est aussi le début de l’enrichissement d’une partie de population. Les pratiques de soins en institut de beauté et l’utilisation de produits de luxe deviennent un phénomène émergeant.

    Après 2000 Période prospère

    Si au milieu des années 1990, les produits et les marques des produits cosmétiques ont commencé à se diversifier, c’était grâce au début de l’apprentissage et à la reprise de pratiques de soins du corps chez les femmes des classes moyennes supérieures urbaines. « En 2001, les classes moyennes constituent quinze pour cent de la population, et en 2006, vingttrois pour cent » (Lu, 2010, 402). Ce pourcentage explique pourquoi dans les années 2000, la consommation et les pratiques passent encore un cap. Certaines femmes remarquent une modification du contexte social. Autour d’elles, leurs amies font toutes davantage attention à leur apparence aussi bien au niveau des soins que du maquillage. Cet entourage les pousse à consommer, à pratiquer des soins ou à se maquiller, sinon, à leurs yeux, elles ne seraient pas « en phase avec le développement de la société » (Mme Zhang, 41 ans, femme d’affaires, HZ).

    Le développement d’internet avec les moteurs de recherche, les microblogs et les réseaux sociaux, la vaste diffusion des magazines de mode et les émissions de mode à la télévision font que les femmes d’aujourd’hui ont beaucoup plus de moyens d’obtenir des informations sur les produits disponibles et les techniques de soin et de maquillage. Il existe aussi les échanges entre amies et collègues ou avec d’autres femmes sur internet. Certaines consultent les forums féminins où des femmes expriment leurs opinions sur les produits cosmétiques qu’elles utilisent, les commentent et donnent leurs astuces pour les soins et le maquillage. Tout cela permet aux femmes chinoises qui n’ont pas reçu la transmission des connaissances des produits cosmétiques de la part de leur mère, à cause d’une rupture de la pratique, de s’initier.

    Certaines investissent beaucoup dans les produits et les pratiques des soins du corps, alors que les prix étonnent les mères qui n’ont pas cette habitude. D’autres racontent les petites histoires avec leur mère ou leur bellemère : quand ces dernières demandent combien coûtent les produits qu’elles achètent, elles n’osent pas en donner le prix qui peut aller jusqu’à quelques milliers de yuans. Elles le divisent par deux ou trois pour ne pas créer de conflits familiaux. « Une bonne femme traditionnelle » devrait tenir le ménage avec diligence et économie. Payer le prix élevé des produits cosmétiques, qui ne sont pas des nécessités pour la vie, équivaut à ne pas savoir diriger la famille aux yeux des mères qui ont connu des famines et des pénuries.

    Émergence d'initiation des produits cosmétiques des mères aux filles

    Avec leurs niveaux de vie plus élevés, certaines femmes achètent des produits importés de l’étranger pour leurs enfants, qui sont considérés comme plus sécurisés que les produits locaux. Des scandales des produits locaux comme la « poudre de lait empoisonné », l’« huile de cuisine recyclé », etc., augmente la méfiance à l’encontre des produits locaux. Quand les femmes ont les moyens et le choix, elles préfèrent les produits occidentaux importés pour les enfants. Pour la génération de leurs filles, on voit émerger une transmission de connaissances liées aux pratiques des produits cosmétiques dans le milieu aisé :

    « Les produits que j’utilise pour mes enfants sont tous achetés à l’étranger, même le dentifrice vient du Japon. Je pense que la qualité des produits étrangers est bien garantie. » (Mme Fang, 34 ans, Directrice, HZ. Son fils a cinq ans et sa fille deux ans et demi.)

    « J’ai choisi une gamme de produits Avène® pour ma fille. C’est une marque pour les peaux sensibles. Je pense que ce sont des produits peu stimulants pour la peau douce d’un enfant. » (Mme Shen, 41 ans, Responsable de service, SH. Sa fille a huit ans)

    Contrairement à leur enfance où leur mère n’a pas transmis des connaissances sur les produits, des interviewées apprennent à leurs filles à prendre soin d’elles dès l’enfance. L’importance des soins de peau est prise en compte dès le plus jeune âge. C’est une transmission et un apprentissage conscients. Pour les enfants, ces pratiques ne sont ni un hasard, ni un simple besoin physique pour apaiser la peau, ils ont conscience de se soigner la peau. Les mères prennent conscience de l’importance de la peau pour une fille et regrette de ne pas avoir soigné leur peau plus tôt, elles ne veulent pas que tout cela reproduise chez leurs filles, surtout aujourd’hui elles ont une vie aisée et les produits de soins sont à la portée de leurs revenus. Les quatre produits d’Avène® supra coûtent autour de 800 yuans (100 euros). Alors que le SMIC moyen mensuel dans les villes était d’environ 1500 yuans (200 euros).

    « J’ai acheté un nettoyant, une lotion, une crème hydratante et une crème solaire Avène® pour ma fille (huit ans). Généralement elle utilise la lotion et la crème hydratante. Si elle a un cours d’éducation physique en plein air, elle sait utiliser la crème solaire et elle utilisera son nettoyant pour le visage le soir. Je lui ai tout appris et je n’ai pas besoin de le lui répéter. Elle sait le faire. »

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    Les quatre produits Avène au milieu sont les produits de la fille de Mme Shen. De gauche à droite : crème hydratante, vaporisateur d’eau thermale, crème solaire et nettoyant visage.
    Ce sont des produits importés de France à base d’eau thermale et vendus aux pharmacies qui sont ainsi considérés par Mme Shen comme des produits naturels (à base d’eau thermale par exemple) et sécurisés pour les enfants.

    « J’ai appris à soigner la peau autour de 20 ans, vous voyez que j’ai des pores obstrués. Notre génération s’est soignée trop tard, pas de produits ni cette conscience quand on était jeune. Alors que pour la génération de ma fille, vu qu’on a les moyens, je lui achète de bons produits et l’initie à soigner la peau très jeune pour ne pas avoir des problèmes plus tard comme moi. » (Mme Shen, 41 ans, Chef de service, SH)

    On peut émettre l’hypothèse qu’aujourd’hui, dans les milieux aisés, les soins du corps commencent à un plus jeune âge en raison de cette imprégnation filiale et de l’attention maternelle, notamment avec l’importation de produits étrangers censés représenter une garantie de qualité tout autant qu’un critère de distinction sociale, vu la cherté des gammes de produits importés.

    Pratiques de soins comme analyseurs de distinctions sociales

    Si les femmes achètent principalement des produits de luxe, d’un côté, c’est qu’elles cherchent une sécurité de produits et une meilleure efficacité. D’un autre côté, elles apprécient le symbole de réussite sociale que portent les produits de luxe. En utilisant de grandes marques, les femmes ressentent le fait « d’avoir de la face ». « La face est comme une médaille d’or que tout le monde se dispute » (Zheng, 1995). Les bonnes marques des produits cosmétiques représentent « la face » de la femme auprès de ses amis ou de ses collègues. Avec ces marques, les femmes veulent attester de leurs vies aisées et de leurs réussites sociales.

    « Entre femmes, on parle souvent des produits qu’on utilise. On est en concurrence sur les produits. C’est sûr qu’on ne le dit pas. Mais si tu me dis que tu utilises des produits Estée Lauder, je vais acheter un produit plus cher que ceuxlà. » (Mme Wang, 41 ans, Femme d’affaires, SH)

    Les activités organisées par les marques de luxe rassemblent des gens ayant un prestige social de même niveau. La participation à ce genre d’activités donne le sentiment « d’avoir de la face ». Plus le statut de quelqu’un est élevé dans la société, plus il « possède de la face ». Ces activités cosmétiques prouvent et confirme ce statut social.

    « J’ai la carte de fidélité de CHANEL®. Ils organisent souvent des activités et nous invitent à y participer. Ces activités ont souvent lieu dans des endroits haut de gamme. La dernière fois c’était dans une grande salle d’un hôtel cinq étoiles très connu à Hangzhou. Les gens invités sont des gens riches. J’aime bien ces activités. Cela montre aussi mon propre succès dans la société. » (Mme Zhang, 41 ans, Femme d’affaires, HZ)

    Au niveau des pratiques ellesmêmes, plus les femmes sont de milieu aisé, plus on constate, chez elles, une diversité de produits cosmétiques de luxe, une diversité des parties du corps sur lesquelles elles investissent et une dépense élevée en institut de beauté. Elles ont le temps et les moyens de se soigner. Certaines n’ont pas besoin de travailler et ont une femme de ménage qui les libère des tâches ménagères. Une interviewée à Shanghai passe une heure et demie à faire des soins le matin. Les femmes ont des habitudes routinières de soin avec une gamme complète de produits cosmétiques : nettoyant visage, lotion, crème pour les yeux, sérum, crème pour le visage. Leurs préoccupations ne se limitent plus au seul visage, toutes les parties du corps sont soignées : le cou, les mains, les pieds, les seins et le dos. Avec un visage bien soigné, les rides du cou révèle l’âge, les interviewées insistent qu’il faut soigner le cou en même temps avec le visage. Pour les mains, une expression est tout le temps citée par les interviewées : « les mains sont le deuxième visage pour une femme ». C’est également une partie qui reflète la distinction sociale.

    « Regardez les mains de ma femme de ménage, c’est sûr elles sont différentes des miennes ! » (Mme Liu, 32 ans, Responsable de RH, SH)

    Les pieds sont le détail morphologique qui montre l’élégance et le raffinement d’une femme. Le dos est normalement caché sous le vêtement, mais certaines femmes de milieu aisé fréquentent les soirées, la robe de soirée qui expose le dos ; cela exige de présenter un dos sans boutons, sans points noirs. On remarque ainsi que la fréquentation de certains endroits change l’importance des parties du corps. Et l’épilation des aisselles est devenue une norme dans les années 2000. Cela est lié à la saison chaude et au modèle sans manche de vêtement. Et probablement lié également au mode de vie comme les vacances :

    « Je ne sais pas depuis quand exactement, mais on commence à faire les épilations aux aisselles dans les 2000. Quand l’on prend le bus, si la fille prend la barre et montre les poils des aisselles, ce n’est pas élégant. Mais ce n’était pas un problème avant. » (Mme Huang, femme au foyer, 33 ans, GZ)

    « En hiver, on va à la source thermale en weekend, dans ce cas, je fais l’épilation aux jambes et aux aisselles, sinon, c’est pas beau en maillot. » (Mme Zhong, Chef de boutique, 28 ans GZ)

    Aucune enquêté n’a parlé de l’épilation du maillotpubis à l’époque des interviews. Mais aujourd’hui, dans les instituts de beauté ou chez les dermatologues, on pourrait voir les offres de l’épilation de différentes parties comme lèvres, aisselles, jambes, pubis. Il existe forcément des femmes qui font l’épilation de ces parties du corps. L’épilation des aisselles est plutôt prônée chez les femmes urbaines, alors que celle des autres parties du corps dépend de l’habitude des femmes, qui relève du raffinement.

    Certaines femmes font des soins du visage en institut de beauté. Avec une vie aisée, elles font des soins de tout le corps et y vont plus fréquemment. Cela vient aussi du fait que les services offerts en institut de beauté sont plus diversifiés que dans les années 1990. Aujourd’hui, les instituts de beauté sont partout dans les grandes villes. Il y en a de haute gamme et de bas de gamme. Cela dépend de la localité et des produits utilisés. Les instituts de beauté dans les beaux quartiers ou dans les grands centres commerciaux de standing sont souvent des chaînes et les produits sont de haut de gammes. Les moyens et les petits se localisent plus souvent dans la rue des quartiers populaires, les produits sont des marques inconnues. Les services comprennent non seulement les soins du visage, mais désormais d’autres parties du corps comme le cou, le dos, le pubis, les seins, les mains ou les pieds. Ils pratiquent des soins avec des produits cosmétiques modernes, mais aussi des soins traditionnels comme le massage, le grattage, les ventouses et les soins à base d’herbes médicinales comme les spas fonctionnels. Beaucoup de nos interviewées vont régulièrement à l’institut de beauté et y dépensent entre 200 et 2000 yuans (25 à 250 euros) à chaque fois, alors que le SMIC moyen mensuel dans les villes était d’environ 1500 yuans (200 euros).

    À l’inverse du maquillage prononcé des années 1980, les femmes d’aujourd’hui adorent le maquillage quotidien « nu » : elles se maquillent pour valoriser la beauté de leurs visages en utilisant des couleurs blanches rosées (couleurs de lotus 藕荷色 Ǒuhé sè) ou des dégradés de brun (des couleurs de terre大地色Dàdì sè) pour donner l’impression de ne pas être maquillée. Elles veulent donner l’impression d’être soignées tout en gardant un visage « naturel ». Lors d’occasions particulières comme lorsqu’elles reçoivent des clients, participent à un repas important ou sortent avec leur mari, certaines utilisent plus de couleurs qui vont bien avec leurs vêtements.

    Le maquillage n’est pas uniquement un plaisir individuel, mais peut constituer une stratégie sociétale. Il se pratique sous la contrainte des normes sociales, familiales, professionnelles et amicales. Plus les femmes sont âgées, plus leur maquillage est discret. Un maquillage soutenu pourrait être considéré comme indigne, voire comme un signe apparenté à la prostitution. Les produits qu’elles utilisent sont des marqueurs de statuts sociaux et relèvent quelquefois d’une norme de groupe. « Le corps physique est ainsi pris et inséré dans un réseau de signes et de symboles dont la perception commune est nécessaire pour le bon déroulement des interactions quotidiennes. » (Détrez, 2002, 129) Certaines sont obligées de commencer ou d’arrêter de se maquiller quand elles changent de travail. Chez les institutrices ou cadres dans les entreprises d’État, le maquillage est ainsi plutôt déconseillé, alors que pour celles qui reçoivent souvent des clients, le maquillage est plutôt imposé par l’entreprise privée.

    « Je travaille dans les finances d’une entreprise d’État, à mon âge le maquillage donnerait une impression de ne pas être sérieuse, on va se méfier de mon travail. » (Mme Liu, 46 ans, comptable, GZ)

    Une belle apparence avec un maquillage lors d’une sortie avec leur mari montrent leurs réussites sociales et leur font « gagner ou monter en prestige de la face (face work) » auprès de leurs amis. Avec l’arrivée de la grossesse, certaines arrêtent les soins, mais presque toutes abandonnent les produits de maquillage qui pourraient nuire au fœtus lors de la grossesse, au bébé lors de l’allaitement ou par contact lorsqu’il est petit. Quelquefois l’abandon de cette pratique n’est pas volontaire, mais se fait sous la pression de l’entourage familial :

    « Depuis ma grossesse, je me maquille beaucoup moins. Mon mari m’a dit de ne plus utiliser de parfum. Je voulais faire une manucure, mes parents et mes beauxparents n’étaient pas d’accord et me demandaient de les écouter pendant la grossesse, de ne pas m’attirer d’ennuis. Les talons hauts ne sont plus permis, j’achète maintenant des baskets et des ballerines. » (Mme Shen, 24 ans, Femme au foyer, SH)

    Réinterprétation des produits cosmétiques selon la conception chinoise du corps

    Dans la vie quotidienne, les femmes font très attention à leur alimentation, leur repos et les sports ou soins traditionnels pour avoir une bonne santé. Ce sont des soins qui s’occupent de l’intérieur du corps. D’après elles, avoir un bel intérieur est la condition préalable pour avoir une belle peau. C’est une vision holiste. À l’extérieur, il faut entretenir la peau, c’est le rôle des produits cosmétiques. Parmi les produits cosmétiques qu’elles distinguent bien les produits de soins et ceux de maquillage. Le terme de « substance nutritive »

    (营养) est fréquemment utilisé au cours des entretiens pour parler des produits de soins. En chinois, les substances nutritives signifient « ce qui cherche à entretenir ». Pour les Chinois, elles désignent certes les aliments mais aussi les produits de soins, qui, en nourrissant la peau, ont également une fonction nutritive. En tant que substances nutritives, il faut donc les faire entrer dans la peau.

    La compréhension de la conception du corps montre le lien qui s’établit avec les pratiques quotidiennes des soins du corps des femmes chinoises. Chez les femmes profanes comme chez les médecins appliquant la médecine traditionnelle chinoise, le corps est toujours conçu en système. En même temps, les pratiques des produits cosmétiques sont également influencées par ce système de pensée. Les produits de soins ayant pour but de pénétrer dans la peau sont considérés comme des substances nutritives. Une fois entrées dans la peau, certains la nourrissent, d’autres en sortent les toxines et certaines autres y accélèrent la microcirculation. Les produits de maquillage sont considérés comme des substances toxiques qu’il ne faut pas faire rentrer, d’où l’importance de la ‘crème de séparation’ (隔离霜: Gélí shuāng), une crème qui sépare les soins et les maquillage comme une barrière. Les gestuelles d’application des produits de soin comme le tapotement, le mouvement circulaire et la pression exercée sur certains points d’acupuncture permettent de mieux faire rentrer les produits et d’accélérer la circulation locale pour que les produits soient plus efficaces. Les femmes chinoises réinterprètent les produits cosmétiques modernes et occidentaux selon leur conception chinoise du corps dans la vie quotidienne.

    Conclusion

    Le rappel historique de l’évolution des soins du corps en Chine montre que les changements politiques et économiques ont profondément touché la vie quotidienne des Chinois, au moins ceux de la classe moyenne et supérieure urbaine depuis ces cinquante dernières années. Les Chinois ont réappris les pratiques des soins du corps qui s’étaient interrompues avec la pénurie matérielle et la Révolution Culturelle. La génération des plus de cinquante ans, qui a connu cette période difficile d’interdiction des pratiques esthétiques du corps lors de la Révolution Culturelle, restée ancrée dans les esprits, n’est pas habituée aux pratiques des soins du corps avec les produits cosmétiques même dans le contexte actuel où les produits sont abondants. Le maquillage est presque absent de la vie de cette génération. « Les représentations et les utilisations du corps, les unes influençant et dictant les autres, sont orientées selon certaines valeurs, divergentes selon les sociétés ou en fonction des groupes sociaux » (Détrez, 1998, 221).

    Les pratiques des soins du corps sont devenues un analyseur des distinctions sociales en Chine. Le nombre des produits, les parties du corps soigné, le temps passé et l’argent dépensé pour ces pratiques sont des indicateurs de distinctions sociales. Elles mettent l’accent sur la sortie avec leur mari. Avoir une belle femme bien soignée est un symbole de richesse de la famille et manifestation du statut social du mari. C’est également important pour les femmes de maintenir les relations conjugales.

    « Quand j’accompagne mon mari à des soirées, je me maquille soigneusement et porte ma montre luxueuse et un sac de luxe. Il faut avoir le style de la femme du patron. » (Mme Shen, 33 ans, femme au foyer, SH)

    « Quand je sors avec mon mari, il me demande de me maquiller, parce que les copines de ses amis se maquillent également. Si je dis non, il me dit de ne pas y aller. » (Mme Liu, 28 ans, HR, HRB)

    Certaines possèdent leur propre société ou occupent un poste important où une apparence raffinée est nécessaire d’après elles dans les interactions sociales :

    « Chaque matin, je réunis mes employés et parle avec eux avant le travail. C’est important d’avoir l’allure de la patronne. Une belle apparence et une peau bien soignée montrent ma capacité financière en tant que patronne. » (Mme Gu, 44 ans, GZ, entrepreneuse)

    La peau d’une femme n’est pas simplement innée, avec l’âge, une peau lisse et jeune est le résultat d’une somme de soins. L’état de la peau et une belle apparence constitue un capital corporel pour les femmes, qui est important pour maintenir les relations conjugales et à transformer en capital social. Mais la mise en scène du corps est en même temps un objet très ambivalent. C’est à la fois un objet de transgression, de plaisir, de contrainte, de tension, d’inquiétude et de distinction sociale à l’école, dans la famille ou dans la société. Elle est un analyseur banal des mutations invisibles qui traversent la société chinoise. « Corps et société semblent indissociables, contrairement au sens commun ou à la pensée organiciste, qui proposeraient le corps comme entité biologique, agencement de cellules réductibles à la seule analyse mécanique. Au contraire, le corps est façonné par la société et pour la société, les deux niveaux interférant souvent » (Détrez, 1998, 221).

    À travers l’histoire socio‑économique de la Chine depuis 50 ans, nous avons suivi l’évolution du contexte social et surtout des normes sociales sur les cosmétiques et leurs développements sur le marché. Nous avons remarqué qu’une évolution de la mise en scène du corps a eu lieu en Chine. Cela explique en partie les effets de générations quant aux pratiques. Dans la période de pénurie entre 1960 et 1980, la préoccupation primordiale était de nourrir sa famille. Les mères ont peu de pratiques cosmétiques. Sans l’influence des médias, d’internet aujourd’hui, les enfants et les adolescentes de l’époque ne sont pas initiées aux pratiques cosmétiques et elles n’ont pas d’exemple à imiter. Puis entre les années 1980 et les années 2000, c’est une période de développement. À la fin de la Révolution Culturelle, le maquillage refait petit à petit son apparition dans la vie quotidienne. Avec le développement du marché des cosmétiques, des femmes commencent à utiliser des produits de soin et essaient de nouveaux produits. À partir de 1995, beaucoup de marques de luxe s’installent en Chine et beaucoup d’instituts de beauté ouvrent dans les grandes villes. Parmi les femmes qui sont les premières à s’enrichir, certaines ont une routine de soins avec une gamme de produits. Le réseau social comme des proches à l’étranger ou les vendeuses joue un rôle plus important à l’époque qu’aujourd’hui. Elles initient les femmes à des nouveaux produits et leurs conseils pèsent dans le choix et les pratiques des produits cosmétiques. Dans les années 2000, le marché des produits cosmétiques est florissant, surtout avec le développement d’internet et des médias. Les femmes sont influencées par les informations diffusées non seulement sur les produits mais également sur les connaissances de la peau, les techniques de maquillage. Elles ont plus d’expertise sur les produits et les techniques qu’aux époques précédentes où elles débutaient. Puisqu’il y a une rupture de pratiques dans les années de pénurie, il existe peu de transmission de connaissances entre mères et filles. Cela expliquerait l’importance de l’apprentissage par internet et les médias chez les femmes chinoises. Aujourd’hui, on remarque que les femmes ayant une pratique du cosmétique initient leurs jeunes filles à l’usage de ces produits.

    L’usage stratégique du maquillage varie en fonction de la situation. On va se maquiller en évitant un risque potentiel : ne pas rater son entretien d’embauche, avoir un beau bébé en bonne santé, ou en augmentant une potentialité : avoir un mari, le garder, lui faire « gagner de la face » lors d’une sortie. Le succès éventuel d’un produit sera lié à leur capacité à atteindre les objectifs sans augmenter les risques.

    L’observation des pratiques liées à l’esthétisation et aux soins du corps explicite quelques éléments de la société chinoise contemporaine. De la pénurie à l’abondance des produits, de l’interdiction du maquillage à la banalité ou la routine de la vie quotidienne. En tant que socioanthropologue, nous pensons en effet, aujourd’hui, que les pratiques du mascara, du rouge à lèvres, des crèmes de soin ou du vernis à ongles sont les signes apparents d’une réalité moins visible, celle de la société et de ses changements. L’étude des pratiques associées aux produits cosmétiques, a priori banales et superficielles, est finalement un moyen pour prendre la mesure des immenses bouleversements qui ont secoué la société chinoise depuis cinquante ans. Ces pratiques sont des analyseurs significatifs de cette histoire, qu’elles soient liées à l’évolution des modes de vie, des classes sociales, des effets de génération, de la politique ou des normes morales.

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    [1]. Les règlements scolaires sont très précis sur l’interdiction du maquillage.

    [2]. Le planning familial de l’enfant unique est appliqué à partir du début des années 1980, il est donc fréquent à l’époque d’avoir trois ou quatre enfants ou même plus.

    [3]. Les interviewées voulaient dire en automne et en hiver. Dans les cinq villes où nous avons fait l’enquête, Canton est dans le sud, a un climat subtropical, en hiver il fait souvent entre 15 et 25 degrés. Les autres villes sont dans le nord, ont un climat continental, où il fait froid et sec en hiver, la température baisse autour de 0 à Hangzhou et Shanghai, 10 à Beijing et 20 à 30 à Harbin.

    [4]. Les villes sont abrégées en lettre de leur nom chinois, HZ, SH, GZ, BJ et HEB pour désigner Hangzhou, Shanghai, Guangzhou, Beijing et Harbin.