Référence électronique
Sauvineau J., (2024), « Jouer au cricket pour panser les blessures de l’exil », La Peaulogie 11, mis en ligne le 28 octobre 2024, [En ligne] URL : https://lapeaulogie.fr/blessures-exil
Jérémy SAUVINEAU
Docteur en anthropologie, chercheur associé au LIR3S (UMR 7366 CNRS), Université de Bourgogne.
Référence électronique
Sauvineau J., (2024), « Jouer au cricket pour panser les blessures de l’exil », La Peaulogie 11, mis en ligne le 28 octobre 2024, [En ligne] URL : https://lapeaulogie.fr/blessures-exil
Résumé
La fermeture progressive des frontières européennes et l’absence de couloirs humanitaires entre les pays de départ et les pays d’accueil des exilés ont livré ces derniers à la violence des passeurs et/ou des gardes-frontières européens. Les blessures subies, notamment à la frontière entre la Serbie et la Croatie, ont produit des corps abîmés, c’est-à-dire difficiles à reconnaître comme siens, pouvant dès lors conduire à une existence diminuée. Cet article documente des parties de cricket organisées par des joueurs afghans en exil : il montre comment, à travers ces dernières, les cricketeurs peuvent reconstruire un rapport positif à soi, à travers le toucher de l’autre, et le toucher de la balle de cricket notamment. Il montre également la manière dont la peau blessée et/ou musclée est un facteur de stratification parmi le collectif de joueurs.
Mots-clés
Migration, Cricket, Toucher, Blessures, Observation participante
Abstract
The progressive closure of European borders and the absence of humanitarian corridors between the countries of departure and the countries of reception have left exiles vulnerable to the violence of smugglers and/or European border guards. The injuries sustained, particularly at the border between Serbia and Croatia, have resulted in damaged bodies that are difficult to recognise as one’s own. They can lead to a diminished existence, even more when these same exiles face discrimination because of skin colour. This article aims to document cricket matches organised by Afghan players in exile: it shows how, through these matches, cricketers can rebuild a positive relationship with themselves, through the touch of the other, and the touch of the cricket ball. It also shows how injured and/or muscular skin is a stratifying factor among the athletes.
Keywords
Migration, Cricket, Injuries, Touch, Participating observation
Depuis le début de l’été 2019, un spectacle inhabituel se déroule sous les fenêtres des maisons des habitants de Froideville, une commune française non‑francilienne d’environ 35 000 habitants. Chaque week‑end, entre la fin du printemps et le début de l’automne, une dizaine d’exilés afghans se retrouvent dans un square municipal afin de s’adonner à un sport méconnu en France, mais largement plébiscité en Afghanistan : le cricket. Introduit au pays par les personnes s’étant réfugiées au Pakistan après l’invasion soviétique des années 1980, le cricket est rapidement devenu le sport phare du pays au cours de la décennie suivante. Une équipe nationale afghane s’est développée avec la bénédiction de l’émirat islamique, avant que le cricket ne fasse l’objet d’une ambitieuse politique de développement de la part du président Hamid Karzai, après la chute des talibans. C’est ainsi que l’équipe nationale s’est solidifiée, puis qualifiée aux différentes Coupes du monde organisées depuis 2015, avant de se hisser dans le groupe d’élite des douze nations de première ligue. Les gouvernements successifs ont rapidement pris conscience du potentiel du cricket comme vecteur d’unité nationale dans un pays déchiré par le tribalisme ou les tensions interethniques : creuset d’identifications, l’équipe nationale est devenue le meilleur moyen pour passer du « « je » au « nous » » (Bromberger et Lestrelin, 2008, 113). Ayant grandi dans ce contexte d’engouement pour le cricket, les cricketeurs afghans installés à Froideville se sont pris de passion pour ce sport, comme l’atteste l’un des joueurs de la bande : « On y joue tout le temps au bled. Là‑bas il n’y a pas d’école, elle est là [montre le terrain de cricket]. Tu joues, juste tu reviens manger chez toi et après tu sors jouer. […] Quand tu commences à jouer après tu ne peux plus t’arrêter ».
Le présent article s’intéresse, ainsi, au réinvestissement, en migration, du sport cricket. Plus précisément, il souhaite documenter les relations qui s’établissent entre migration, cricket et peau. Si l’épreuve qu’est la mobilité forcée (Bulle, 2012) conduit à des marquages, violents et biopolitiques, des corps en déplacement, quelle est la force du cricket pour que les exilés rebondissent et intègrent leurs abîmes corporels pour continuer à vivre, et parfois même à « devenir plus fort[s] » (Le Breton et Butnaru, 2013, 2) ? En quoi le toucher – qu’il soit celui de l’autre, ou d’une peau non‑humaine avec la balle de cricket – peut‑il étayer une (lente) reconstruction de soi ?
Les pratiques sportives ont, jusqu’à présent, reçu peu d’attention dans le champ des études migratoires, a fortiori au sein des Refugee studies – malgré une croissance récente des publications, parallèle à la « crise des migrants » des années 2010. Ces travaux, notamment anglo‑saxons, tendent à s’aligner sur les priorités politiques, soit en faisant du sport un moyen de promouvoir l’intégration et le bien‑être des réfugiés, soit en s’intéressant à la participation aux clubs sportifs. Dans les deux cas, le sport n’est qu’un supplément d’âme dans un processus plus large visant à « encapaciter », intégrer, voire assimiler des réfugiés « déficitaires » : le sport n’est qu’un moyen au profit d’une fin (Spaaij et al., 2019). Le présent article désire opérer un pas de côté par rapport à ces recherches. D’une part, il s’intéresse au cricket, un sport relativement méconnu en France où les études ont surtout porté sur des pratiques plus populaires, à l’image du football (Gasparini, 2007). D’autre part, il aborde le sport à partir des expériences corporelles et émotionnelles qu’en ont des demandeurs d’asile et des réfugiés, expériences essentielles si l’on veut comprendre la signification du sport et de l’activité physique dans leur vie quotidienne (Spaaij et al., 2019). Enfin, il place la focale sur des regroupements informels, lesquels ont été peu analysés malgré leur caractère courant (Evers, 2010 ; Michelini, 2023). La pratique informelle est ici comprise comme une participation sportive auto‑organisée, une arène inclusive où chacun est le bienvenu et libre de faire du sport comme il l’entend (Nesse et al., 2018). Ce dernier décalage permet de s’extraire d’une appréhension déficitaire des réfugiés en mettant au centre des préoccupations leur agency.
Après avoir présenté ma démarche de recherche, je m’arrêterai, dans un premier temps, sur les violences que les exilés afghans de Froideville ont subi durant leur parcours migratoire et, plus précisément, sur les conséquences protéiformes des traces laissées par les gardes‑frontières croates sur le/les/leur corps. Le deuxième point de mon argumentation reviendra sur les potentialités offertes par les parties de cricket pour reconstruire un lien positif à soi : par le biais du « toucher de l’autre », ou en retrouvant des « techniques du corps » (Mauss, 2010 [1950]) susceptibles de réancrer la personne dans le monde phénoménal. Enfin, je montrerai en quoi certaines traces corporelles, au premier titre desquelles figurent les blessures sportives et l’exposition subséquente de la peau nue, sont un facteur de distinction et de stratification de ce collectif afghan observé : elles renvoient alors à l’importance de la force individuelle au sein d’un univers, à bien des égards viriliste et masculiniste.
Cette réflexion s’inscrit dans le cadre d’une thèse en anthropologie visant à documenter les manières dont des formes d’« attachements patrimoniaux » équipent les mobilisations suscitées par les migrations contemporaines (Sauvineau, 2023). Ces matchs de cricket, découverts à la suite de la publication de deux articles dans deux journaux régionaux, m’ont d’emblée paru congruents avec le sujet principal de mes recherches. Je voyais effectivement dans ce sport un « bagage culturel » permettant d’atténuer les difficultés induites par les épreuves de l’asile et de l’exil. À la suite de la lecture des deux articles, je me suis rendu à Froideville pour un premier contact avec les joueurs (août 2020). Celui‑ci m’a permis d’observer une première après‑midi de jeu(x) et de discuter avec quelques participants. J’y ai rapidement remarqué le fort investissement affectif des joueurs envers les parties de cricket, qui produisaient des moments d’effervescence qui n’avaient rien à envier à la passion des supporters de football étudiés par Bromberger (1995).
Deux semaines plus tard, je suis retourné à Froideville et j’ai cette fois‑ci pris part à plusieurs parties de cricket, sur invitation de Suhail, l’un des joueurs. Participer aux parties m’a permis, d’une part, de me rapprocher des joueurs et, d’autre part, de moi‑même éprouver les qualités du cricket en m’inscrivant dans ce dispositif inter‑affectif (Evers, 2010, 60). Ainsi, une proximité complice s’est construite avec mes coéquipiers à partir de leur enseignement des règles et des gestes élémentaires du cricket. Chaque transmission a été l’occasion pour eux de livrer des détails biographiques quant à leur propre apprentissage du cricket, leurs expériences sportives passées, ou leur parcours migratoire, à la manière des boxeurs avec lesquels L. Wacquant s’est entraîné et a enquêté (2002 [2000]). L’épreuve du jeu m’a quant à elle offert l’occasion d’appréhender les échanges à bas bruit, de percevoir la finesse des gestes ou l’importance du toucher. C’est grâce à cette participation observante que les problématiques situées au carrefour du marquage corporel, de la migration et de la peau me sont apparues.
Cette présence n’a cependant pas été dénuée d’effets, puisqu’elle a « faussé » les parties en raison de mon inexpérience et de mon ignorance des règles – même si j’ai bénéficié du traitement de faveur envers les débutants. Surtout, elle a fourni un public aux joueurs, une occasion rare en ce que très peu d’interactions se sont nouées avec les promeneurs, qui ne s’arrêtent jamais plus de quelques instants. Le terrain s’est alors transformé en une scène de théâtre où les cricketeurs sur‑jouaient chaque coup particulièrement réussi, ou dramatisaient chaque raté.
Les sportifs rencontrés pratiquaient déjà le cricket en Afghanistan, en famille et/ou avec les amis du quartier. Ils ont emporté avec eux des expériences et des significations liées à ce dernier comme le masculinisme (Agergaard, 2018 ; Agergaard et al., 2022). Si certains ont pu jouer sur des terrains corrects lorsqu’ils étaient plus jeunes, d’autres ont eu moins de chance, étant obligés de détourner de leurs usages officiels les objets du quotidien : la rue faisait office de terrain, la balle de tennis servait de balle, etc. Ces bricolages et cette auto‑organisation sont réinvestis en migration, comme je le montrerai. Est également réinvestie une certaine signification du cricket, à la fois comme un espace de liberté par rapport à un quotidien jadis marqué la pauvreté et la guerre, aujourd’hui par l’absence de la famille, le manque de liens sociaux ou par les traumatismes du chemin migratoire (Evers, 2010). Mais aussi comme un espace de communion entre les joueurs, les appartenances ethniques étant gommées à chaque partie comme à chaque visionnage d’un match de l’équipe nationale de l’Afghanistan.
Tous les joueurs rencontrés sont des hommes. Ce fait n’est pas surprenant au regard de la composition de la migration afghane en France : en 2019, 94 % des premières demandes d’asile déposées étaient masculines (Ofpra, 2020, 115). Cette caractéristique représente toutefois une limite aux analyses, en ce que je ne peux confronter les expériences sportives à la lumière d’une perspective de genre, alors même que la pratique sportive demeure largement segmentée en fonction de celui‑ci, dans les pays d’origine comme dans les pays d’accueil (Lenneis et al., 2022 ; Evers, 2010).
À la différence des ressortissants des pays africains, les exilés originaires du Proche ou du Moyen‑Orient ont presque tous emprunté la route migratoire dite « des Balkans » pour parvenir en France, celle‑ci les menant de la Turquie à l’Italie via la Grèce, la Macédoine du Nord, le Kosovo, la Serbie, éventuellement la Bosnie‑Herzégovine, la Croatie et la Slovénie. Si chaque franchissement de frontière est une épreuve, le passage le plus brutal est probablement celui entre la Serbie et la Croatie. Cette dernière, en raison de sa candidature à l’adhésion à l’espace Schengen, s’efforce de démontrer aux pays membres ses capacités à juguler les flux migratoires et à défendre les frontières extérieures de l’espace de libre circulation, dont elle pourrait devenir la garante (Dujmovic, 2016). Pour ce faire, le gouvernement croate étanchéifie ses frontières avec la Serbie et la Bosnie‑Herzégovine, et tente de restreindre au maximum le nombre d’étrangers pénétrant sur son territoire. L’une des conséquences de ces pressions qui se répercutent en cascade est l’utilisation récurrente de la violence par les gardes‑frontières croates (Borsotti et Duflos, 2022).
Les Afghans de Froideville ont affronté ce qu’ils appellent le « jeu » [game] du passage entre la Serbie (ou la Bosnie) et la Croatie, et y ont récolté coups, vols, et violences. Les exilés que j’ai rencontrés durant mes recherches, notamment ceux ayant transité par la route des Balkans, n’ont pas hésité à me présenter des clichés photographiques relatifs aux blessures qui leur avaient été infligées au cours de leurs tentatives successives de passage. Ecchymoses, hématomes à la circonférence effrayante, plaies ou cicatrices constituaient autant de traces corporelles qui rappellent aux personnes encore aujourd’hui les violences des forces de l’ordre croates.
Les violences subies ne cessent pas à l’arrivée sur le territoire français – même si les exilés rencontrés se sont montrés peu loquaces à leur égard. D’une part, via la prise (forcée) des empreintes par les autorités préfectorales, dont le but est de déterminer le pays responsable de la demande d’asile du requérant. Si les empreintes correspondent avec d’autres enregistrées précédemment dans un pays de l’Union Européenne, le demandeur doit alors être renvoyé là où les empreintes ont été repérées – en général dans les pays de premier accueil comme l’Italie ou la Grèce. Il y a encore quelques années, il n’était pas rare d’assister au sordide spectacle d’exilés se brûlant volontairement le bout des doigts afin d’éviter d’être « dublinés » en Italie ou en Grèce. Les lourdes sanctions mises en place par le législateur ont toutefois eu raison de cette pratique d’auto‑mortification. Désormais, les personnes n’ont plus d’autre choix que de se résoudre à placer leurs empreintes sur la machine et, le cas échéant, à être trahies par cette marque digitale unique (Le Courant, 2022, 77). D’autre part, le statut de requérant de l’asile affecte durement les corps par les épreuves qu’il fait subir, puisqu’il impose une limite géographique aux déplacements, qu’il rend (très) difficile l’occupation d’un emploi salarié, ou parce qu’il se caractérise par des moyens financiers restreints. Tarek et Salam déplorent le fait d’être « devenus gros et paresseux » en raison de la nourriture de mauvaise qualité ingurgitée et de « l’apprentissage à la paresse » qu’est l’asile (« L’inactivité ça fait devenir paresseux. Je n’ai pas de motivation. Je ne fais plus rien. Je passe ma journée sur mon portable et mon ordinateur à regarder des films ou écouter de la musique »). L’éloignement et l’inquiétude vis‑à‑vis de la famille marquent de rides profondes les visages, et font grisonner les chevelures. Les corps se courbent et s’ankylosent, sont de plus en plus difficiles à mouvoir : d’une certaine manière, les personnes ne se reconnaissent plus.
Ces traces épidermiques et capillaires – hématomes, rides, grisonnement, cicatrices… – entraînent inévitablement des conséquences sur la santé physique et psychique des personnes en migration. La psychologue Marie‑Caroline Saglio‑Yatzimirsky a montré que les exilés victimes de violences étaient touchés par une déréalisation et une désappropriation de leurs propres corps, dévastatrices pour le soi (2018, 244). Effectivement, la succession de violences altère l’image de soi et l’identité des personnes ; elle dévalorise, dépersonnalise, dépouille et « porte atteinte à la dignité, dégrade la personne, ruine l’estime de soi » (Le Courant, 2022, 53). Ce corps impropre, chargé de violences, est « déproprié » (Andrieu et Da Nobrega, 2017), générant dès lors un sentiment de ne plus avoir de corps à soi, rendant complexe son utilisation comme mode de régulation identitaire.
Ainsi, la gestion essentiellement sécuritaire des migrations a produit des « corps abîmés », c’est‑à‑dire des corps difficiles à reconnaître comme siens, des chairs altérées menant « à une existence diminuée » (Le Breton et Butnaru, 2013, 1) : « l’abîme a un rapport à la souffrance, à la douleur, à l’intrusion insistante de formes étrangères à soi au cœur de soi‑même » (p. 1).
Les humiliations endurées lors du déplacement migratoire puis lors de la demande d’asile entament l’estime de soi. Toutefois, comme le soulignent David Le Breton et Denisa Butnaru, les exilés peuvent (éventuellement) rebondir et « intégrer [leurs] abîmes pour continuer à vivre malgré tout et parfois même à devenir plus fort[s] » (2013, 2). Mon hypothèse est que le cricket s’offre comme un moyen (à expérimenter) pour les Afghans accueillis à Froideville, de restaurer de « nouvelles significations » à leur corporéité, rendant possible la construction « d’autres repères » et de « possibilités de vie » (p. 3). Deux expériences me paraissent particulièrement décisives à relater pour montrer comment le sport a un effet sur les corps, autant sur les « articulations endolories » que sur la « santé mentale », comme l’ont montré V. Lenneis, A. Evans et S. Agergaard dans une étude récente portant sur les nageuses réfugiées au Danemark (2022) : le toucher de l’autre, et celui du matériel de cricket.
Le déplacement migratoire, parce qu’il questionne ce qui fait la cohésion de soi, se laisse subsumer par la notion d’« épreuves », i.e. des défis structuraux pour les individus, la nature structurelle tenant à la « signification majeure » que ces épreuves revêtent pour ces derniers (Martuccelli, 2015, 53). L’épreuve vise ainsi à décrire et à comprendre la manière dont les individus font face à des changements. L’une des épreuves sur laquelle se sont appesantis les exilés de Froideville a trait à la sociabilité et à l’isolement qui les touchent, résultant, entre autres, du stigmate que peut représenter un épiderme foncé : « À mon arrivée, quand je me promenais et voyais quelqu’un susceptible d’être Afghan, je lui demandais s’il voulait jouer [au cricket] […]. Dans notre situation, c’est difficile de se faire des amis » affirme Yanis. Le constat désabusé qu’établit Yanis met en avant le manque de contact culturel‑corporel que peuvent ressentir les migrants une fois arrivés en France. La couleur de peau continue d’être un stigmate (au sens de Goffman) pour ces derniers, qui sont nombreux à me rapporter des situations où ils ont été victimes de discriminations, qu’ils attribuent (parfois) à une forme de racisme latent de la part de certains « français » : manque de liens et d’échanges avec des personnes blanches, regards marqués par la méfiance et la suspicion, délit de faciès de la part des employeurs ou des policiers, etc. Quand elle n’est pas renvoyée à un racisme plus ou moins larvé, elle est perçue comme la conséquence d’une inattention civile synonyme d’invisibilisation pour les migrants : en Europe avance Souleyman, on « existe uniquement sur papiers ». Pour ceux qui en sont dépourvues, la logique est limpide : ils n’existent pas. Quand il se meut dans la ville, Souleyman a l’impression d’être « invisible » : « parce que quand on se balade dans la ville, on est des invisibles, on se sent invisible. On n’a pas d’interaction ». N’ayant plus l’impression « d’exister », Souleyman est affecté par l’exclusion des « Français ». Si la proximité corporelle de l’autre et a fortiori son toucher peut, en Occident, amener « à la gêne » – en raison d’un viol potentiel de notre umwelt (Goffman, 1973 [1959]) –, il en serait différemment du monde arabo‑musulman, « d’homme à homme » notamment (Le Breton, 2006, 229).
Le match de cricket prend la forme d’un rituel pour les Afghans de Froideville, durant lequel le « toucher de l’autre » est omniprésent, et rompt avec ce quotidien d’isolement (corporel, culturel et social). En effet, les parties sont scandées par des salutations et félicitations chaleureuses à l’opposé des fades poignées de main, ainsi que par des étreintes interindividuelles, lors des explosions de joie notamment. Malgré la menace sourde de l’épidémie de Covid‑19 – deux observations participantes ont eu lieu entre les deux confinements – les mesures de distanciation n’avaient que peu d’effet : au contraire même, les corps s’éprouvaient et devaient s’éprouver. Apparaît ici une distinction fondamentale de la rencontre sportive, où l’émotion soude les individus, ces derniers ne faisant plus qu’un dans une explosion des frontières du soi (Le Breton, 2006, 231). Surtout, au‑delà de la fusion en un corps collectif, toucher l’autre prend aussi le sens d’une pratique d’attention entre les joueurs, dont les situations personnelles et/ou administratives sont généralement épineuses : « quand l’existence se dérobe, le contact d’une personne signifiante, affectivement investie, incarne une limite d’existence, un contenant, et restaure une valeur personnelle battue en brèche par la maladie ou l’âge » (p. 237). Face à des « français » incapables de respecter un principe fondamental – « les interactions sociales sont un besoin naturel » avance Souleyman –, les membres de la diaspora représenteraient un soutien corporel inestimable en réconfortant par le juste toucher, plein de « considération » (Macé, 2017). En bref, la scène sportive informelle s’offre comme une arène où partager ses difficultés et s’aider pour les résoudre. Elle s’affiche comme un lieu familier où reconstruire des liens et des attaches par le partage d’expériences affectives, avance C. Evers, dans une étude portant sur de jeunes footballeurs africains réfugiés en Australie (2010) ; et un lieu où éprouver un sentiment de communauté et d’appartenance avec des pairs : les joueurs y « ont développé des réseaux sociaux, de la confiance et un sens de la communauté avec d’autres réfugiés » (Nesse et al., 2023, 13).
Si le corps est une mémoire, le sens du toucher l’est pareillement – une mémoire d’autant plus importante que le toucher est, pour Le Breton, le « seul sens indispensable à la vie […] la souche fondatrice du rapport de l’homme au monde » (2006, 177). Toujours selon l’anthropologue, le toucher permettrait à l’Homme de s’enraciner dans un terrain tangible, cohérent et solide. En touchant ajoute‑t‑il, on reconnaît l’existence des choses : « le monde, et donc la présence de l’autre est d’abord une modalité tactile » (p. 181).
Ce sens est l’un des plus mobilisés dans l’assemblage affectif qu’est le terrain de sport (Evers, 2010) : avant de lancer, le lanceur doit examiner avec minutie la balle, en sentir les aspérités et l’usure à la manière des experts de C. Bessy et F. Chateauraynaud (1995). Si Abbas affirme que le cricket est un sport de force, il m’assure également qu’il n’est pas que cela : avant d’entrer en piste, le lanceur doit « scruter » [check] la balle avec attention, une opération qu’Abbas compare à de « l’ingénierie ». Avant ses lancers, ce dernier examine systématiquement la balle à l’aide du regard, mais aussi et surtout du toucher : il tâtonne pour sentir le côté « soft » et le côté « dur » [hard] de la balle. Cet examen s’apprend en jouant et fait, au fur et à mesure, changer le corps du lanceur : la main de celui qui devient expert se modifie en acquérant de la corne, lui permettant en retour de mieux analyser les aspérités de la balle. De la sorte, le lanceur devine comment et où il doit la lancer, en étudiant également la piste de cricket. Lors de ces moments critiques, le toucher est indissociable de la vue. Ce sont les yeux qui doivent aider le toucher dans son examen méticuleux de la balle, la vue qui doit étudier là où il faut/ne faut pas lancer la balle sur le pitch : c’est l’œil qui permet d’appréhender la balle et sa trajectoire probable. Le lanceur pourra ainsi réaliser des effets, et faire partir la balle « vers la droite ou vers la gauche ». Par exemple, Abbas a, graduellement et grâce à sa pratique répétée du cricket, développé un « savoir‑prendre » qui passe par le corps‑à‑corps entre les « plis » offerts par la matière et les « repères » fabriqués par les êtres (Bessy et Chateauraynaud, 1995). Les plis offerts par la balle sont le produit des qualités intrinsèques de cette peau non‑humaine qu’est le cuir, qui a la capacité de s’user et de laisser apparaître des traces et des irrégularités que le lanceur peut ressentir à l’aide du toucher, puis exploiter. Les repères, portés par les joueurs, sont sollicités par la mémoire. Cette forme d’expertise évolue au cours du match dans la mesure où les balles se détériorent : tout nouveau lancer redemande un examen méticuleux de la part des joueurs, l’usure de la balle influençant les effets et les rebonds.
Puisqu’aucun des joueurs ne pouvait se rendre à Paris régulièrement pour s’approvisionner, il a fallu inventer de quoi remplacer les balles. Même si elles sont « un peu grandes », les balles de tennis font l’affaire si elles sont enroulées de ruban adhésif pour les rendre plus lourdes. Cette économie de la débrouille fait directement écho à la pratique du cricket en Afghanistan : là‑bas comme ici les cricketers assemblent des objets pour s’adonner à leur passion. Cet assemblage produit des balles bien différentes de ce qu’elles devraient être selon les très strictes Laws of cricket, obligeant dès lors à les examiner différemment, et à développer une nouvelle forme d’expertise. En effet, les propriétés du cuir ne sont pas similaires à celles du ruban adhésif : surface lisse, marquage rapide par les coups de batte, poids plus lourd, etc. La superposition de couches de ruban empêche tout examen poussé d’une balle sur laquelle les coups ne laissent aucune trace ni n’entraînent de modification sensible. De fait, le jeu est en quelque sorte faussé par la substitution d’une peau animale par une peau synthétique.
De son côté, le batteur doit éprouver sa batte, la saisir correctement, et faire corps avec elle pour catapulter la balle le plus loin possible du terrain. Durant mon apprentissage, Nour, un des joueurs, a insisté longuement sur le fait qu’il faille bien la serrer, la taper au sol lorsque l’adversaire‑lanceur prenait son élan pour bien l’éprouver, « me rendre compte que je l’ai en main et que nous ne faisons plus qu’un, comme si elle était un prolongement de mes bras ou que je fusionne avec elle ».
Être touché par l’autre, et toucher l’autre permet de trouver un soutien, corporel et psychique, de la part d’autres humains. Se saisir de la balle et retrouver des techniques du corps et du toucher concourent à un ré‑ancrage dans le monde. Pour autant, si la peau réunit des êtres en migration, elle tend inversement à les distinguer en stratifiant la diaspora afghane à Froideville. Mon analyse se concentre sur deux mécanismes.
Au cricket, le lanceur et le batteur sont les deux héros du moment, comme le gardien et le tireur d’un penalty le sont au football. Le pitch, sur lequel ils s’affrontent, est la scène véritable du cricket. Chaque lancer est une épreuve de force, à l’issue toujours incertaine (Bromberger, 1995). Au sortir de cet affrontement, les individus changent d’état, le lanceur quelconque devenant l’« homme du match », quand le batteur apparaît comme un simple débutant, ou loin de son niveau habituel. La hiérarchie qui émerge de la partie se fixe à l’issue des lancers. Elle repose principalement sur la force physique des joueurs, dans la mesure où la malice dont peuvent faire preuve les lanceurs (en donnant, par exemple, des effets à la balle) est rendue caduque par un terrain inapproprié et des balles artisanales dont la peau synthétique les rend impropre aux effets. L’élan parfois démesuré pris pendant certains lancers, l’importance donnée à la vitesse lors du sprint des joueurs, l’insistance sur la dangerosité du cricket, confluent vers la mise en exergue de la force individuelle au sein d’un univers viriliste et masculiniste – où, du moins, les qualités athlétiques des pratiquants sont positivement évaluées. Cette signification, importée d’Afghanistan (Agergaard et al., 2022), participe de l’éloignement des femmes réfugiées du terrain de sport, comme le montrent R. Spaaij et ses collaborateurs dans une revue de littérature consacrée aux pratiques sportives des réfugiés (2019). À l’instar des matchs de football auxquels C. Bromberger a assisté, j’ai été le témoin de l’exhibition des qualités viriles où les hommes « se contemplent, se glorifient, en mesurant leurs aptitudes, objet d’une perpétuelle compétition » (1995, 289). Se jouent et se rejouent durant ces matchs (de football comme de cricket), les identités masculines des sportifs, construites à partir de la force de chacun (Gasparini, 2007). Appadurai a pointé les changements considérables d’images qu’a connus le cricket depuis la décolonisation britannique de l’Inde. Il fait notamment le constat de l’érosion des valeurs traditionnelles (victoriennes) au profit de valeurs nettement plus masculinistes. Il décrit ainsi un sport « agressif, souvent peu fair‑play », « agonistique », inscrit « dans le corps indien (masculin) », et « dominé par les hommes » (2015 [1996], 166‑172).
Dans un ouvrage consacré à des Afro‑Caribéens passionnés de cricket et ayant émigré au Canada, Janelle Joseph (2017) avance des éléments similaires. Elle raconte comment les joueurs afro‑caribéens avaient plaisir à lui décrire et à lui montrer leurs blessures dues au cricket : « qu’il s’agisse d’éraflures superficielles ou de lacérations profondes, [ils continuaient] à jouer au cricket en tant que garçons […]. Les situations dangereuses témoignent également de leur bravoure, un marqueur de la masculinité afro‑caribéenne » (2017, 91). Abbas et Najib exposent eux aussi la dangerosité du cricket. Abbas insiste sur le fait qu’il est un « sport dangereux », où certains cricketers peuvent trouver la mort : il me raconte l’histoire tragique d’un joueur australien de 22 ans, décédé à la suite de lésions cérébrales causées par une balle propulsée à pleine vitesse lors d’un match. Najib appuie sur le fait que le cricket n’est pas « du golf », mais qu’il est un « vrai sport » qui demande à « courir vite » et surtout à « avoir de la force ». Comme Abbas il signale que le cricket est un « sport dangereux » où l’on peut « mourir si l’on n’a pas les bonnes protections » : « Parfois ils frappent la balle et c’est vraiment dangereux ! La balle peut te frapper, tu peux mourir. On doit avoir un casque, mais pas trop lourd pour pouvoir courir, et plein d’autres protections ». Surtout, à moi aussi m’ont été montrées les blessures récoltées lors de parties de cricket ayant eu lieu au pays, et signes positifs d’engagement de soi (Le Hénaff et al., 2008, 558).
La démonstration de la dangerosité inhérente au cricket ainsi que ses traces corporelles permettent aux joueurs d’évoquer le sérieux de leur passion, d’exposer leur bravoure, mais aussi de renforcer une masculinité qu’ils estiment écorchée par la migration. J. Joseph note qu’une masculinité amplifiée et exagérée est devenue la pièce maîtresse d’une « culture de la compensation » qui soulage la misère des personnes subordonnées, comme le sont les Afro‑Caribéen à Toronto, ou les Afghans à Froideville (p. 53). Plus globalement, la formation d’une identité masculine à travers le cricket est une des leçons cardinales du travail de J. Joseph, et que j’ai aussi retrouvée à Froideville. Au Canada, cette dernière met en exergue le machisme des joueurs, la récurrence des « blagues homophobes », l’exclusion des épouses et des filles des matchs (mais non de la concoction des mets pour la troisième mi‑temps), les insultes, la véhémence des discours, etc., soit autant d’éléments centraux dans la « performance d’une masculinité afro‑caribéenne » arc‑boutée sur la rudesse des propos et la force de chaque joueur (2017, 51). Il est toutefois à noter que je n’ai été le témoin d’aucune insulte ni de « blague homophobe » de mauvais goût à la manière de J. Joseph : j’ai seulement constaté une véhémence systématique des paroles échangées, de nombreuses moqueries sur le niveau des joueurs, l’absence de l’épouse et de la fille d’un joueur, ainsi que d’un très haut volume sonore, à la manière de J. Joseph – tout en ajoutant néanmoins que je ne comprenais que les mots échangés en français ou en anglais, pas en pachto.
La référence à la force physique est omniprésente dans les propos des joueurs afghans de Froideville, a fortiori quand l’exercice du toucher de la balle est simplifié et écourté en raison des propriétés de balles non fabriquées à partir de peaux animales.
La force individuelle est exposée au moins d’une autre façon chez Suhail. Ce dernier est le joueur le plus talentueux du collectif afghan. En plus de renverser presque systématiquement le guichet de son adversaire quand il est lanceur et ainsi assurer le maximum de points à son équipe, Suhail est un remarquable tireur. Ce dernier déplore la baisse de son niveau de jeu, à la fois parce qu’il joue moins qu’en Afghanistan, et parce que ses adversaires ne sont pas à sa hauteur. Il stigmatise l’embonpoint de certains de ses compatriotes qui les empêche de courir rapidement, ou l’âge avancé d’autres, qui les handicape également quand il s’agit de courir vite (Spaaij et al., 2019) : « Au pays, j’étais capitaine de mon équipe […]. Petit à petit je perds parce que je n’ai pas beaucoup joué depuis que je suis en France. Mais les vieux ici ils sont nuls ». Ainsi, si le genre est un facteur d’exclusion, il apparaît également que l’âge ou le poids le sont aussi – en ce que personne ne souhaite être avec les sportifs les moins bons comme le dit Suhail – comme le note S. Agergaard (2018, 92).
Quoi qu’il en soit, Suhail est le seul joueur de la bande à régulièrement jouer torse nu, ou vêtu d’une veste sans manche et généralement ouverte, qui laisse entrevoir ses biceps, ses pectoraux et ses abdominaux. D’ailleurs, sur un célèbre réseau social, Suhail a pris l’habitude d’exposer des photographies de ses muscles saillants dans des positions suggestives, à la salle de sport comme à son domicile. Le corps dénudé‑parce‑que‑musclé qu’exhibe Suhail dans une logique spectaculaire – sur le terrain de cricket comme dans les espaces virtuels –, renforce cette masculinité valuée et mise à mal durant et après le parcours migratoire : en effet, le corps est ici mis en scène et s’affiche comme un « support » de « la masculinité et de sa démonstration », redonnant en outre un « contours et un contenu positifs à l’identité de sexe » bouleversée par la migration (Vallet, 2014, 318). Ainsi, si Suhail est admiré par ses compatriotes, c’est autant pour « ses performances que pour son corps « en soi » » (p. 94).
Cet article précise les liens entre peaux, migration afghane et cricket à la suite d’observations dans la localité de Froideville. Le déplacement migratoire et l’expérience de la société d’accueil, en l’absence de corridors sûrs entre les pays de départ et d’accueil, est marqué de nombreuses violences, particulièrement spectaculaires lors des franchissements de frontières. Ces peaux abîmées exposent les exilés à des difficultés psychiques, pouvant aller jusqu’à la « dépropriation du corps ». Mais ceux‑ci ne sont pas que « le spectacle de la désolation ou de la domination » (Bulle, 2012, 234). La diaspora, parce qu’elle octroie un soutien autant corporel que psychologique offre des étais sur lesquels se reposer : la justesse du toucher et le toucher juste sont les signes d’une attention (Macé, 2017), geste rare en raison d’un épiderme trop bronzé ou d’une inattention civile. De même, « savoir prendre » la balle de cricket (ou la batte, même si mon exposé s’est concentré sur la première), offre le moyen de se réancrer dans le monde sensible en ce que le contact avec les choses « est le seul appel possible du réel […]. Voir ne suffit pas à s’assurer du réel, seul le toucher a ce privilège » (Le Breton, 2006, 185). La peau s’affiche comme un vecteur de structuration interne de la diaspora masculine afghane de Froideville, mais aussi comme un des supports de (re)création d’une masculinité fragilisée par la demande d’asile qui réduit le requérant à une simple position de bénéficiaire des subsides publiques ne pouvant ni travailler ni subvenir à ses propres besoins ou à ceux de sa famille. Exposer sa peau nue ou ses blessures devient alors une manière de réaffirmer cet idéal de masculinité et de se reconstruire une identité positivement valuée : l’activité sportive s’affiche comme la possibilité de développer de nouvelles identités par le partage de moments de plaisir et de détente, comme le montre le travail de S. Agergaard auprès des réfugiése au Danemark (2018 ; Lenneis et al., 2022).
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